Moïse, au seuil de la mort, rédige son testament –HaAzinou- sous forme de chant. Le dessein de ce testament n’est pas tant de récapituler l’Histoire d’Israël (Deut. 32: 7) mais plutôt d’en tracer les lignes futures (Deut. 32: 35-43) afin de renforcer le peuple qui, en voie de constitution se doit de demeurer fidèle à sa vocation (Deut. 32: 44-47).
Moïse exhorte les cieux et la terre à écouter ses paroles:
ש«הַאֲזִינוּ הַשָּׁמַיִם וַאֲדַבֵּרָה וְתִשְׁמַע הָאָרֶץ אִמְרֵי-פִי» (דברים לב, א).ש
«Écoutez, cieux, je vais parler; et que la terre entende les paroles de ma bouche». (Deut. 32: 1)[1]
Pourquoi Moïse trouve-t–il juste de prendre à témoin en ce chant les cieux et la terre?
Cette question trouve sa réponse au verset 40 où Moïse clame:
ש«כִּי-אֶשָּׂא אֶל-שָׁמַיִם יָדִי וְאָמַרְתִּי חַי אָנֹכִי לְעֹלָם» (דברם לב, מ).ש
«Oui, j’en lève la main au ciel, j’en atteste mon éternelle existence» (Deut. 32: 40).
Cette expression de «lever les mains» introduit la notion de serment (Midrash Genèse Raba 43, 9).
ש«וַיֹּאמֶר אַבְרָם, אֶל-מֶלֶךְ סְדֹם: הֲרִמֹתִי יָדִי אֶל-יְהוָה אֵל עֶלְיוֹן, קֹנֵה שָׁמַיִם וָאָרֶץ» (בראשית יד, כב).ש
«Abram répondit au roi de Sodome: Je lève la main devant l’Éternel, qui est le Dieu suprême, auteur des cieux et de la terre» (Gen. 14: 22)
Moïse Parashat HaAzinou marcherait donc sur les traces du Patriarche Abraham en ouvrant son discours sur un serment qui engagerait les fils d’Israël à accomplir leur vocation morale, spirituelle et politique face à l’Eternel.
Par ailleurs, la promesse d’une longue vie sur la terre d’Israël est assurée aux Hébreux qui vivront pleinement la Parole divine. (Deut. 32, 47).
Les cieux et la terre deviennent les témoins vivants du progrès spirituel d’Israël et de sa fidélité envers l’Alliance conclue au Sinaï avec l’Eternel. Le commentateur et sage français du Moyen âge, Rashi, se fondant sur Deutéronome 11: 17, enseigne que Moïse en appelle aux deux grands témoins de l’action d’Israël. Les cieux et la terre battent au rythme du cœur d’Israël. La Nature devient le reflet d’Israël!
ש«וְחָרָה אַף-יְהוָה בָּכֶם וְעָצַר אֶת-הַשָּׁמַיִם וְלֹא-יִהְיֶה מָטָר וְהָאֲדָמָה לֹא תִתֵּן אֶת-יְבוּלָהּ וַאֲבַדְתֶּם מְהֵרָה מֵעַל הָאָרֶץ הַטֹּבָה אֲשֶׁר יְהוָה, נֹתֵן לָכֶם.» (דברים יא, יז).ש
«La colère du Seigneur s’allumerait contre vous, il défendrait au ciel de répandre la pluie, et la terre vous refuserait son tribut, et vous disparaîtriez bientôt du bon pays que l’Éternel vous destine» (Deut. 11: 17)
Si la lecture du livre du Deutéronome s’achève sur le testament de Moïse où les cieux et la terre apparaissent comme des entités autonomes douées d’une âme, le premier livre de Genèse, quant à lui, débute par la Création des cieux et de la terre. Quel lien pouvons-nous établir entre ces deux passages?
Tout le projet divin porté par Israël et résumé dans le chant HaAzinou ne serait-il point déjà inscrit en germe dans la Création ?
Moïse, conscient de l’imminence de sa mort, avertit Israël sur la lourde responsabilité qui lui incombe de supporter face aux générations futures de l’Histoire:
ש«וַיֹּאמֶר אֲלֵהֶם שִׂימוּ לְבַבְכֶם לְכָל-הַדְּבָרִים אֲשֶׁר אָנֹכִי מֵעִיד בָּכֶם הַיּוֹם: אֲשֶׁר תְּצַוֻּם אֶת-בְּנֵיכֶם לִשְׁמֹר לַעֲשׂוֹת אֶת-כָּל-דִּבְרֵי הַתּוֹרָה הַזֹּאת» (דברים לב, מו) ש
«Il leur dit: “Prenez à cœur toutes les paroles par lesquelles je vous admoneste en ce jour, et que vous devez ordonner à vos enfants pour qu’ils observent avec soin toutes les paroles de cette Tora» (Deut. 32, 46).
Notons que l’idée sous-jacente du verbe “admonester” (מֵעִיד בָּכֶם) en hébreu renvoie Israël à sa vocation première de témoin de l’Eternel. Nous pourrions traduire le verset:
«Prenez à cœur toutes les paroles par lesquelles je ferai de vous des témoins».
Israël devient, alors, par son adhésion à l’injonction divine une lumière pour l’ensemble de l’Humanité.
Shabbat shalom,
Avec toute mon amitié,
[1] Parashat HaAzinou: Deutéronome 32: 1- 52
Je vous invite à rejoindre le nouveau projet « Questions sur la Parashat HaShavoua» et à nous faire part de votre interprétation.
Ce projet a pour dessein de mieux faire connaitre la source biblique. Des questions bibliques sont proposées. Vos réponses sont les bienvenues.
Si l’étude du TaNaKh vous fait rêver, n’hésitez pas à me joindre:
Au plaisir de vous retrouver,
Haïm Ouizemann
5 réponses
Cher Haim ,
Comme les enfants , je regarde d’abord l’image , ensuite , je lirai le texte .
L’image :
Un ciel azur , sans nuages , donc : vide et ouvert .
Une cité paisible s’elance vers le ciel
La terre couverte de liane Ipomea pes carpae .
Cette liane servait ,dans nos iles, à fabriquer des filets de pêche .
Puissions nous ,tout au long de notre vie, tresser des filets afin de pêcher les poissons cachés dans le texte de la vie et construire sur cette terre une cité paisible tendue vers un ciel d’azur .
Merci pour la photo – icone
Ann
Shalom Haïm,
Merci pour tes commentaires toujours intéressants, et tes questions qui nous poussent à réfléchir.
Voici mes réponses :
Question 1 :
De même qu’il existe un lien incontestable entre le récit de la Création et le testament de Moïse, les liens entre Deu 32 : 1-2 et Gen27 : 28 sont évidents ; je m’explique :
• ROSEE DES CIEUX : de même que la rosée est une bénédiction pour la terre (Genèse), le discours de l’Eternel enrichit l’homme (Deut.)
• SUCS DE LA TERRE : si ces sucs sont ce que la terre produit de meilleur (Gen.), les Paroles de l’Eternel doivent avoir une portée incomparable dans le cœur de l’homme.
• LES MOISSONS ET LES VENDANGES de Genèse peuvent être mises en rapport avec les résultats de l’enseignement divin qui doit féconder le cœur de l’homme. C’est par notre obéissance, notre service, notre amour pour l’Eternel que nous produisons en abondance les fruits voulus par D.ieu : amour du prochain, intégrité du cœur et de l’esprit, force de la Foi.
Question 2 :
Sachant que Jacob deviendra Israël, la bénédiction d’Isaac concerne en fait Israël.
Dès lors, cette bénédiction rejoint les promesses faites à Israël dans Deu. 11 : 14-15 : pluie, abondance des récoltes pour l’homme et son bétail.
Mais là encore, la FIDELITE est une condition sine qua non (versets 16 et 17)
écoute cieux et que la terre entende pour moi veut dire que toute la création écoute. je lève les mains au ciel c’est regarder au Dieu suprême. Mon enseignement ruissellera comme la pluie, ma parole coulera comme la rosée,(verset 2) comme des pluies douces sur l’herbe et comme de grosses averses sur la végétation, en écoutant et suivant la parole de Dieu et en la mettant en pratique alors la rosée et la pluie de bénédiction coulera sur le peuple de Dieu, mais dans le cas contraire c’est la malédiction.il faut donc suivre la voie de la fidélité et de la justice (verset 4)