Notre parasha fait référence aux prémices – uniquement des sept espèces végétales symbolisant le Pays d’Israël – qu’il incombe à l’agriculteur hébreu d’offrir au Temple de Jérusalem.
א וְהָיָה כִּי-תָבוֹא אֶל-הָאָרֶץ אֲשֶׁר יְהוָה אֱלֹהֶיךָ נֹתֵן לְךָ נַחֲלָה וִירִשְׁתָּהּ וְיָשַׁבְתָּ בָּהּ. ב וְלָקַחְתָּ מֵרֵאשִׁית כָּל-פְּרִי הָאֲדָמָה אֲשֶׁר תָּבִיא מֵאַרְצְךָ אֲשֶׁר יְהוָה אֱלֹהֶיךָ נֹתֵן לָךְ וְשַׂמְתָּ בַטֶּנֶא וְהָלַכְתָּ אֶל-הַמָּקוֹם אֲשֶׁר יִבְחַר יְהוָה אֱלֹהֶיךָ לְשַׁכֵּן שְׁמוֹ שָׁם. (דברים כו: א-ב).ש |
1 “Et quand tu seras arrivé dans le pays que l’Éternel, ton Seigneur, te donne en héritage, quand tu en auras pris possession et y seras établi, 2 Et tu prendras des prémices de tous les fruits de la terre, récoltés par toi dans le pays que l’Éternel, ton Seigneur, t’aura donné, et tu les mettras dans une corbeille ; et tu te rendras à l’endroit que l’Éternel, ton Seigneur, aura choisi pour y faire régner son nom. (Deutéronome 26 : 1- 2).[1] |
Par cet acte de reconnaissance envers l’Eternel, l’agriculteur reconnaît humblement qu’il n’est point le maître du monde et qu’il ne doit sa bénédiction qu’au Créateur, Maître de l’Univers.
יא וְשָׂמַחְתָּ בְכָל-הַטּוֹב אֲשֶׁר נָתַן-לְךָ יְהוָה אֱלֹהֶיךָ וּלְבֵיתֶךָ אַתָּה וְהַלֵּוִי וְהַגֵּר אֲשֶׁר בְּקִרְבֶּךָ. (דברים כו: יא).ש |
11 Et tu te réjouiras pour tous les biens que l’Éternel, ton Seigneur, aura donnés à toi et à ta famille, et avec toi se réjouiront le Lévite et l’étranger qui est dans ton pays. (Deutéronome 26 : 11). |
Tout premier fruit aussi bien végétal[2] et animal (Exode13 : 12) qu’humain (Exode 13 : 2) témoigne de la bénédiction divine.
Le Midrash,[3] par la voie des Sages d’Israël et plus particulièrement de Rashi (Cf. Genèse 1 : 1) ne manque point de noter l’analogie du terme « RéShIT- רֵאשִׁית » mentionné dans notre parashah (Deutéronome 26 : 2) avec l’expression citée au tout début de la Création (Genèse 1 : 1) :
א בְּרֵאשִׁית בָּרָא אֱלֹהִים אֵת הַשָּׁמַיִם וְאֵת הָאָרֶץ. (בראשית א: א).ש |
1 Au commencement, le Seigneur créa le ciel et la terre. (Genèse 1: 1) |
Deux remarques préalables d’ordre grammatical sont à remarquer avant même d’aborder le contenu du Midrash relatif au terme « RéShIT”- רֵאשִׁית ». En effet, deux traductions peuvent être proposées. D’une part « A un commencement » (Le shéva mobile placé sous la préposition Be- בְּ- indique l’indéfini) ; d’autre part, sous l’effet de la règle de la chaîne construite, l’on pourrait traduire : « Au commencement de… ». Autrement dit, un terme manquerait après « BeRéShIT- בְּרֵאשִׁית ».
Que revêt cette comparaison et dans quelle mesure l’analogie du verset Genèse 1 : 1 appliquée au verset Deutéronome 26 : 2, aussi riche d’occurrences identiques, permet-elle de dégager un sens original du texte biblique de notre parashah ? La tradition, se fondant sur la méthode du « Drash (“allusion, questionnement, recherche…”) » enseigne que le terme « RéShIT – רֵאשִׁית » peut être compris: « prémices [de sa récolte] » :
ג קֹדֶשׁ יִשְׂרָאֵל לַיהוָה רֵאשִׁית תְּבוּאָתֹה כָּל-אֹכְלָיו יֶאְשָׁמוּ רָעָה תָּבֹא אֲלֵיהֶם נְאֻם-יְהוָה. (ירמיהו ב: ג)ש |
3 Sainteté d’Israël, appartenant à l’Eternel, prémices de sa récolte : ceux qui en font leur nourriture sont en faute ; il leur arrivera malheur,” dit l’Eternel. (Jérémie 2 : 3). |
Nous pourrions en déduire que la source scripturaire préfère susciter la recherche parmi ses lecteurs afin qu’il en tire toute la quintessence. Est-il possible d’imaginer qu’un terme manque à la Source biblique, d’origine divine ? Serait-elle donc si imparfaite que les Sages veuillent compléter de supposées « lacunes » ?
Les Sages proposent une lecture créatrice en associant le terme « תְּבוּאָתֹה (Tévouato) Sa récolte » au premier mot de la Torah בְּרֵאשִׁית. La portée d’une telle exégèse s’avère extrêmement significative car cela signifierait, alors, que l’Eternel prélevant Israël- appelé à devenir son « בְּכוֹר fils aîné » (Exode 4 : 22) – du reste des Nations apporte, dès l’origine de la Création, la bénédiction au monde. Quiconque porte atteinte à l’intégrité d’Israël blesse par voie de conséquence l’Eternel mais aussi chaque être humain. De plus, cela signifie que la Création, dès son origine, est porteuse d’une direction et d’une intention cachée (Téléologie). Israël, compris également dans sa dimension téléologique de « prémices du temps », germes féconds d’un futur prometteur, se transforme donc en une source de Bénédiction pour le monde et l’ensemble du genre humain :
י מַגִּיד מֵרֵאשִׁית אַחֲרִית וּמִקֶּדֶם אֲשֶׁר לֹא-נַעֲשׂוּ אֹמֵר עֲצָתִי תָקוּם וְכָל-חֶפְצִי אֶעֱשֶׂה. (ישעיהו מו: י).ש |
10 Dès le début, j’annonce les choses futures, et longtemps d’avance ce qui n’est pas encore accompli ; je parle ma décision demeure, et tout ce que je veux, je le réalise. (Isaïe 46 : 10). |
[1] Parashat Ki Tavo, Deutéronome 26: 1- 29: 8
[2] Exode 23 : 19 ; 34 : 26 ; Lévitique 2 : 12 ; Nombres 15 : 20 ; Deutéronome 18 : 4.
[3] Herméneutique biblique développée à l’ère rabbinique après la destruction du Second Temple.
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Shabbat shalom !
Avec toutes mes amitiés,
Haïm Ouizemann