L'hébreu biblique
Le blog de Haïm Ouizemann

Parashat VaYétsé, Ya’akov, un monde unifié  

וַיִּקְחוּ בְנֵי-אַהֲרֹן נָדָב וַאֲבִיהוּא אִישׁ מַחְתָּתוֹ וַיִּ

"Le rêve de Jacob", Marc Shagall (Musée de Nice )
“Le rêve de Jacob”, Marc Shagall (Musée de Nice )

 Dès lors que Ya’akov quitte sa terre natale, Erets Cana’an, il «arriva au lieu», sans plus de précisions.

ש«וַיִּפְגַּע בַּמָּקוֹם וַיָּלֶן שָׁם כִּי-בָא הַשֶּׁמֶשׁ וַיִּקַּח מֵאַבְנֵי הַמָּקוֹם וַיָּשֶׂם מְרַאֲשֹׁתָיו וַיִּשְׁכַּב בַּמָּקוֹם הַהוּא» (בראשית כח, יא).ש

«Il arriva au lieu, il s’y reposa, parce que le soleil était couché. II prit d’entre les  pierres du lieu, en fit son chevet et passa la nuit dans ce lieu.» (Gen. 28: 11).[1]

Le verbe hébraïque  וַיִּפְגַּע  (Racine verbale P. G. ‘ / פ. ג. ע), signifie «rencontrer subitement» (Gen. 32, 2; I Sam. 10: 5; Isaïe 47: 3), «s’unir, toucher» (Josué 17: 10) et «exaucer une prière» (Gen. 23: 8; Jérémie 7:  16). Tous ces verbes renferment toujours une idée de violence, mais aussi d’une rencontre intense, caractère inhérent à la vocation du troisième Patriarche, Ya’akov.

L’exil forcé de Ya’akov, initié par sa mère Rivka soucieuse de le préserver de la vengeance de son frère Essav (Gen. 27, 41),  porte les germes d’un futur relèvement assuré par l’Eternel. Loin du cadre familial, Ya’akov est conduit malgré lui à connaître l’union avec le  Divin. La coupure, son départ, s’avère génératrice de fécondité! Mentionné à trois reprises (Gen. 28: 12 et Gen. 28: 13), le terme HINeH exprime l’engagement de  l’Eternel à accomplir sa promesse donnée à Avraham et à Its’hak, père et grand-père de Ya’akov:

ש«וְהִנֵּה יְהוָה נִצָּב עָלָיו וַיֹּאמַר אֲנִי יְהוָה אֱלֹהֵי אַבְרָהָם אָבִיךָ וֵאלֹהֵי יִצְחָק הָאָרֶץ אֲשֶׁר אַתָּה שֹׁכֵב עָלֶיהָ לְךָ אֶתְּנֶנָּה וּלְזַרְעֶךָ» (בראשית כח, יג).ש

«Puis, l’Éternel apparaissait au sommet et disait: “Je suis l’Éternel, le Dieu d’Abraham ton père et d’Isaac; cette terre sur laquelle tu reposes, je te la donne à toi et à ta postérité». (Gen. 28: 13).

Où est donnée cette promesse?

Le substantif MaKOM (מָקוֹם), lieu mentionné à trois reprises dans un même verset, ne peut qu’interpeller le lecteur. Que signifie ce terme et que revêt ce lieu connu, comme le laisse entendre l’article «Le Lieu»?

MaKOM ((מָּקוֹם est le lieu du redressement, de la verticalité témoignant de la future indépendance spirituelle de Ya’akov

ש«אֲנִי יְהוָה אֱלֹהֵיכֶם אֲשֶׁר הוֹצֵאתִי אֶתְכֶם מֵאֶרֶץ מִצְרַיִם מִהְיֹת לָהֶם עֲבָדִים וָאֶשְׁבֹּר מֹטֹת עֻלְּכֶם וָאוֹלֵךְ אֶתְכֶם קוֹמְמִיּוּת» (ויקרא כו, יג).ש

«Je suis l’Éternel votre Dieu, qui vous ai tirés du pays d’Egypte pour que vous n’y fussiez plus esclaves; et j’ai brisé les barres de votre joug, et je vous ai fait marcher la tête haute.»  (Lev. 26: 13; Cf. également le terme TeKOuMaH Lev. 26: 37).

Alors que Ya’akov est couché à même le sol et  endormi  וַיָּלֶן («VaYaLeN») dans la nuit de l’exil – phase de déclin de la lumière de Ya’akov (Gen. 28: 11), il semble encore inespéré d’assister à la renaissance de celui qui esr appelé à devenir le père de la nation hébraïque…

…Ce Lieu, toutefois,  nous précise l’Ecriture, n’est autre que la «Porte des Cieux», à savoir le Lieu du futur Temple de Jérusalem qui, déjà, apparaît sous le terme de «MaKOM» chez Avraham au moment où ce dernier s’apprête à sacrifier son fils Its’hak (Gen. 22: 3-4). Ainsi, le peuple d’Israël, objet de multiples vicissitudes de l’Histoire (Ecclésiaste 9: 11) et rendu à l’état de «petit reste d’Israël» («She’ERIT Israël» «שְׁאֵרִית יִשְׂרָאֵל») (Jer. 31, 6; Ez. 9, 3; Soph. 3, 13 …), renaîtra sans cesse de ses cendres tel le phœnix, «l’oiseau des sables»[2].

ש«וַיִּירָא וַיֹּאמַר מַה-נּוֹרָא הַמָּקוֹם הַזֶּה אֵין זֶה כִּי אִם-בֵּית אֱלֹהִים וְזֶה שַׁעַר הַשָּׁמָיִם» (בראשית כח, יח).ש

«Et, saisi de crainte, il ajouta: “Que ce lieu est redoutable! Ceci n’est autre que la maison du Seigneur et c’est ici la porte du ciel.» (Gen. 28:18).

En ce même lieu où se dresse l’échelle de Ya’akov se rencontrent et s’unissent les cieux et la terre. Ya’akov, déchiré par la nuit de l’exil et les mensonges de Lavan, a pour vocation de rapprocher les contraires afin d’édifier un monde de paix et d’harmonie. Ya’akov commence à construire cette difficile harmonie dans sa propre cellule familiale au sein de laquelle il doit surmonter la rivalité entre ses deux épouses, les sœurs Leah et Rachel.

De plus, après avoir pris «d’entre les pierres du lieu» (Gen. 28: 11) Ya’akov ne pose sa tête que sur «une seule pierre», symbole de l’unité à laquelle il aspire:

ש«וַיַּשְׁכֵּם יַעֲקֹב בַּבֹּקֶר וַיִּקַּח אֶת-הָאֶבֶן אֲשֶׁר-שָׂם מְרַאֲשֹׁתָיו וַיָּשֶׂם אֹתָהּ מַצֵּבָה וַיִּצֹק שֶׁמֶן עַל-רֹאשָׁהּ» (בראשית כח, יח).ש

«Jacob se leva de grand matin; il prit la pierre qu’il avait mise sous sa tête, l’érigea en monument et répandit de l’huile à son faîte». (Gen. 28: 18).

La «pierre» soulevée par Ya’akov et ointe d’huile est, selon la Tradition orale, identifiée à la «Pierre de Fondation» (Even HaSheTIYAH) à l’origine de la Création toute entière et de l’unité du genre humain.

Jérusalem sera, un jour prochain, la Cité où toutes les Nations s’assembleront afin d’y reconnaître la vocation unificatrice et pacifique de Ya’akov qui, surmontant les tourments et les contradictions de l’Histoire, proclame par sa vie exemplaire l’Unicité du Nom de l’Eternel, l’unicité du genre humain dans le respect des différences:

ש«וְהָלְכוּ עַמִּים רַבִּים, וְאָמְרוּ לְכוּ וְנַעֲלֶה אֶל-הַר-יְהוָה אֶל-בֵּית אֱלֹהֵי יַעֲקֹב וְיֹרֵנוּ מִדְּרָכָיו וְנֵלְכָה בְּאֹרְחֹתָיו כִּי מִצִּיּוֹן תֵּצֵא תוֹרָה וּדְבַר-יְהוָה מִירוּשָׁלִָם» (ישעיהו ב, ג).ש

«Et nombre de peuples iront en disant: “Or çà, gravissons la montagne de l’Eternel pour gagner la maison du Dieu de Jacob, afin qu’il nous enseigne ses voies et que nous puissions suivre ses sentiers, car c’est de Sion que sort l’Enseignement  et de Jérusalem la parole du Seigneur.») Isaïe 2: 3)

 

[1] Parashat VaYétsé, Genèse 28: 10- 32: 3

[2] «Un oiseau et son nom est oiseau des sables… Il vit 1000 ans, et au bout de mille ans, du feu sort de son nid et le brûle et il n’en reste plus que la valeur d’un œuf et de nouveau il fait croître ses membres et revit» (Genèse Rabba, 19, 5).

 

Si l’étude du TaNaKh vous fait rêver, n’hésitez pas à me joindre:

[email protected]

Au plaisir de vous retrouver,

Shabbat shalom!

,Avec toutes mes amitiés

Haïm Ouizemann

Partager sur email
Partager sur whatsapp
Partager sur facebook
Partager sur twitter
Partager sur linkedin
Partager sur print
Souscription au Blog par Email

Entrez votre adresse mail pour suivre ce blog et être notifié par email des nouvelles publications.
Rejoignez les 777 autres abonnés

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée.

Quelques mots sur moi

J’ai plus de 30 ans d’expérience dans l’étude et l’enseignement de la Bible. Il n’y a pas de limite à ce que la Bible prodigue comme connaissance et inspiration pour la vie.
A propos…

Souscription au Blog par Email

Entrez votre adresse mail pour suivre ce blog et être notifié par email des nouvelles publications.
Rejoignez les 777 autres abonnés

Archives