L'hébreu biblique
Le blog de Haïm Ouizemann

Parashat Ki Tétsé: L’Egypte, l’expérience de l’Universel

וַיִּקְחוּ בְנֵי-אַהֲרֹן נָדָב וַאֲבִיהוּא אִישׁ מַחְתָּתוֹ וַיִּ

La lumière brille pour tous les hommes
La lumière brille pour tous les hommes

La condition d’esclavage qu’Israël  eut à subir en Egypte est, à maintes reprises, rappelée dans cette Parasha:

ש«וְזָכַרְתָּ כִּי עֶבֶד הָיִיתָ בְּמִצְרַיִם וַיִּפְדְּךָ יְהוָה אֱלֹהֶיךָ…» (דברים כד, יח-כא).ש

«Rappelle-toi que tu as été esclave en Egypte et que l’Éternel, ton Dieu, t’en a affranchi…» (Deut. 24: 18-21)[1]

Pourquoi Moïse insiste-t-il sur le passé difficile et douloureux des Hébreux au moment même où il conduit ceux-ci au pays où coulent le lait et le miel? N’aurait-il pas été préférable de considérer la promesse divine d’un avenir radieux en terre promise plutôt que de se retourner vers le passé comme le fit la femme de Lot avant d’être transformée en statue de sel? Mais pourquoi l’Eternel, alors  qu’Abraham avait reçu la promesse d’une grande descendance (Gen. 15: 5) et conclu avec ce dernier l’Alliance entre les morceaux (Gen. 15: 9-11),  annonce-t-il  que ses fils, les enfants d’Israël, connaîtront la condition d’esclaves?

ש« וַיֹּאמֶר לְאַבְרָם יָדֹעַ תֵּדַע כִּי-גֵר יִהְיֶה זַרְעֲךָ בְּאֶרֶץ לֹא לָהֶם וַעֲבָדוּם וְעִנּוּ אֹתָם-אַרְבַּע מֵאוֹת, שָׁנָה» (בראשית טו, יג).ש

«Dieu dit à Abram: “Sache-le bien, ta postérité séjournera sur une terre étrangère, où elle sera asservie et opprimée, durant quatre cents ans » (Gen. 15: 13)

N’y a-t-il point contradiction entre l’assurance d’un futur heureux et la promesse d’être esclave en Egypte, condition humiliante, impliquant souffrance et aliénation?

Il semble que ce regard vers ce que fut la condition d’esclave constitue l’indivisible noyau historique à partir duquel se forme non seulement une Conscience commune nécessaire pour fonder une nation unie mais aussi essentielle à l’instauration d’un monde meilleur. L’esclavage d’Egypte demeure l’archétype  de tous les droits bafoués à travers le monde pour lesquels des hommes et des femmes poursuivent encore et toujours leur combat. Nombreux sont celles et ceux parmi les Nations comme Harriet Tubman, surnommée la “Moïse Noire” (1822- 1913) et le Révérend Martin Luther King  (1929-1968) qui s’inspireront de l’Histoire d’Israël en Egypte pour fonder la vision rédemptrice de leur propre nation. La particularité de l’Histoire d ‘Israël constitue la condition par excellence de son ouverture à l’Universel. Comment pourrions-nous comprendre la douleur de l’autre sans en avoir vécu l’expérience personnelle et collective? Ce passage en Egypte que l’Eternel promit à Abraham doit être considéré non point comme un châtiment mais comme une étape nécessaire à la naissance du peuple d’Israël disposé à pénétrer en Canaan, la terre promise. La liberté des autres dépend de la nôtre!

Israël, fils d’Abraham «le père d’une multitude de nations» (Gen. 17: 4) est appelé à devenir une grande nation et une lumière pour l’ensemble du genre humain à partir d’Erets Israël (Gen. 17: 8) dès lors qu’il s’identifie aux droits d’autrui et à la souffrance du prochain.

ש«לֹא-תִרְדֶּה בוֹ בְּפָרֶךְ וְיָרֵאתָ מֵאֱלֹהֶיךָ » (ויקרא כה, מג).ש

«Tu ne le tyranniseras [le serviteur]  point et tu craindras ton Seigneur (Lev. 25: 43)».

ש«וַיַּעֲבִדוּ מִצְרַיִם אֶת-בְּנֵי יִשְׂרָאֵל, בְּפָרֶךְ. וַיְמָרְרוּ אֶת-חַיֵּיהֶם בַּעֲבֹדָה קָשָׁה, בְּחֹמֶר וּבִלְבֵנִים, וּבְכָל-עֲבֹדָה, בַּשָּׂדֶה–אֵת, כָּל-עֲבֹדָתָם, אֲשֶׁר-עָבְדוּ בָהֶם, בְּפָרֶךְ» (שמות א’, יג, יד).ש

«Les Égyptiens accablèrent les enfants d’Israël de rudes besognes. Ils leur rendirent la vie amère par des travaux pénibles sur l’argile et la brique, par des corvées rurales, outre les autres labeurs qu’ils leur imposèrent tyranniquement» (Exode 1: 13-14)

Se  souvenir de la Sortie d’Egypte, c’est accomplir notre double devoir, à savoir celui de justice à  l’égard d’autrui et d’autre part, c’est ne point oublier notre mission sociale: donner aux plus faibles et démunis de la société (Deut. 24: 17-19).

Alors, Israël, recevant la Bénédiction divine, deviendra un exemple de lumière et de compassion pour l’ensemble du genre humain.

[1] Parashat Ki Tetse: Deut. 21: 10- 25: 19

Je vous invite à rejoindre le nouveau projet « Questions sur la Parashat HaShavoua» et à  nous faire part de votre interprétation.

Ce projet a pour dessein de mieux faire connaitre la source biblique. Des questions bibliques sont proposées. Vos réponses sont les bienvenues.

Si l’étude du TaNaKh vous fait rêver, n’hésitez pas à me joindre:

[email protected]

Au plaisir de vous retrouver,

Haïm Ouizemann

© Haïm Ouizemann, Août 2015

 

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4 réponses

  1. Je ne sais pas si c’est ici qu’on participe aux questions de la Parashat?? Sinon dis moi.
    “Ne découvre point la nudité de la femme de ton frère, c’est la nudité de ton frère”
    Voilà un interdit très net: on n’a aucune relation sexuelle, on ne pose pas les yeux sur la femme de son frère. En la respectant on respecte son frère.
    “Si des frères vivent ensemble et que l’un d’eux vienne à mourir sans postérité, la veuve ne pourra se marier en dehors à un étranger, c’est son beau-frère qui doit s’unir à elle. Il la prendra donc pour femme”. (petite question: et si la femme n’a aucune envie de s’unir à son beau-frère??, on n’envisage que le cas contraire. Autre petite question: en résumé le beau-frère, s’il est déjà marié devient polygame?)

    Bref le premier verset s’adresse, je pense, aux couples en pleine forme. Les 2 frères sont vivants.
    Le 2ème verset indique que les 2 frères doivent déjà vivre ensemble, (dans la même maison sans doute) et le beau-frère ne pourra s’unir à sa belle-sœur seulement si elle n’a pas donné de postérité à son mari (qu’appelle t’on postérité: les fils seuls ou les filles aussi??)

    C’est la protection de la continuité familiale qui est importante, qui donc justifie cet inceste.

    Est ce toujours d’actualité aujourd’hui??.

  2. “Découvrir la nudité de …” est une façon pudique de dire “avoir des rapports sexuels avec …”, ce que confirme Le 20:21 ” Si un homme prend la femme de son frère, c’est une impureté ; il a découvert la nudité de son frère : ils seront sans enfant.”. Dans ce cas, il y a vraiment inceste.

    Il en est tout autrement dans Deu 25:5 où, là, il s’agit de la Loi du “Yibboum” traduit imparfaitement par “Loi du Lévirat”, ce qui ne rend pas le sens exact de “Yibboum” qui vient du verbe יבם qui signifie “remplir les devoirs de beau-frère envers sa belle-soeur, la veuve de son frère QUI N’A PAS LAISSE D’ENFANTS et l’épouser ; de plus, le verbe est au piel, forme intensive, qui marque bien l’importance de l’injonction. Il s’agit alors d’assurer la pérennité du nom du défunt, d’où le fait que la veuve ne peut se remarier qu’avec le frère de son mari.

  3. Il n´y aucune contradiction entre les deux textes car l´un se réfère au frère décédé et qui laisse sa femme sans enfant, et, donc, son frère vivant en s´unissant avec sa belle-soeur, assure ainsi la continuation du nom de son frère. Geste noble. Nous voyons l´exemple dans Bereshit, 38:6-30 qui explique que Yehudah avait pris une femme, Tamar, pour son fils aîné, Er mais ce dernier meurt sans donner d´héritier. Yehuda ordonne à son frère, Onan, de dormir avec sa belle-soeur pour assurer la continuité du nom de son frère mais ce dernier meurt également, D.ieu le punissant car il ne voulut pas obéir à son père. A chaque relation intime, il laissait tomber le sêmen par terre pour ne pas donner d´héritier à son frère. Yehudah avait encore un fils trop jeune et ainsi demande à Tamar d´attendre chez son père pour que son fils Shelah grandisse. Entretemps, Yehudah devient veuf et il oublie la promesse à Tamar. Elle se déguise en prostituée et se donne à ce dernier et tombe enceinte. Les gens veulent la tuer mais elle avait pris soin de prendre des affaires personnelles de Yehudah et à donc ainsi la preuve que le père est Yehudah. Celui-ci n´ayant pas respecté sa parole, il reconnaît qu´il est coupable et la sauve de la punition. Elle devient maman de gémeaux, Peretz et Zerach. Continuation du nom de son mari. Plus jamais, elle n´aura plus jamais de rapport avec son beau-père.
    Le deuxième cas, est que le frère ne peut en aucun cas voir la nudité de sa belle-soeur car elle est la femme de son frère. Donc, c´est un acte que l´on considère incestueux et abominable qui est punissable. Il y a un exemple, mais ce n´est pas exactement cela, c´est Reuven qui se couche avec la concubine de son père. Il perd ses droits d´aînesse. Acte abominable.
    Le cas de Ruth est différent, son mari (Machlon) meurt et le frère (Kilyon) de ce dernier est marié. De plus, celui-ci meurt aussi. Son mari meurt sans lui laisser un héritier. En Israel, vit deux personnes qui pourraient servir pour la continuation du nom de son mari et c´est Boaz qui la prendra comme femme et fait perpétuer le nom de son mari. Il était le parent éloigné de ce dernier. Nous voyons que tout est dans l´ordre de la loi, car l´enfant qu´elle va porter, Oved, sera l´arrière-grand-père du roi David.

  4. Bel article Haîm! Merci
    Oui la liberté des autres dépend de la notre.
    On ne peut prétendre à la Paix sur cette terre si nous ne sommes pas en Paix nous-même.
    On ne peut prétendre étendre la Liberté à tous, si nous ne sommes pas nous-même libres.
    Comme nous le dit si bien le récit biblique la souffrance doit être vécue, puis surmonter, dépasser pour avancer, construire. Toute souffrance non surmontée nous maintient esclave de nous et des autres..
    C’est une démarche personnelle qui s’étendant à un ensemble de personnes peut donner une grande force collective.
    C’est une grande leçon, qui aussi nous dit qu’un Chef est indispensable pour aider à trouver le chemin de sortie. (enfin un vrai Chef qui sait voir loin dans l’intérêt de tous et non pour sa petite et misérable gloriole personnelle. Moïse n’a sans doute jamais imaginé une seconde être inscrit pour l’Éternité dans l’Histoire humaine)

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J’ai plus de 30 ans d’expérience dans l’étude et l’enseignement de la Bible. Il n’y a pas de limite à ce que la Bible prodigue comme connaissance et inspiration pour la vie.
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