L'hébreu biblique
Le blog de Haïm Ouizemann

Parashat Kora’h, le mauvais berger  et la fidèle brebis

וַיִּקְחוּ בְנֵי-אַהֲרֹן נָדָב וַאֲבִיהוּא אִישׁ מַחְתָּתוֹ וַיִּ

 

(© Haïm Ouizemann)
(© Haïm Ouizemann)

ש«וַיִּקָּהֲלוּ עַל-מֹשֶׁה וְעַל-אַהֲרֹן וַיֹּאמְרוּ אֲלֵהֶם רַב-לָכֶם כִּי כָל-הָעֵדָה כֻּלָּם קְדֹשִׁים, וּבְתוֹכָם יְהוָה וּמַדּוּעַ תִּתְנַשְּׂאוּ עַל-קְהַל יְהוָה.» (במדבר טז, ג).ש

«…et, s’étant attroupés autour de Moïse et d’Aaron, ils leur dirent: “C’en est trop de votre part! Toute la communauté, oui, tous sont des saints, et au milieu d’eux est le Seigneur; pourquoi donc vous érigez-vous en chefs de l’assemblée du Seigneur?» (Nombres 16: 3)[1]

Kora’h reproche à Moïse, son oncle, de vouloir monopoliser le pouvoir et s’ériger en dictateur, ainsi que l’Hébreu qui a tué un autre Hébreu d’entre ses frères le lui a déjà reproché (Ex. 2, 14). Moïse répond:

ש «הַמְעַט מִכֶּם, כִּי-הִבְדִּיל אֱלֹהֵי יִשְׂרָאֵל אֶתְכֶם מֵעֲדַת יִשְׂרָאֵל לְהַקְרִיב אֶתְכֶם, אֵלָיו–לַעֲבֹד, אֶת-עֲבֹדַת מִשְׁכַּן יְהוָה וְלַעֲמֹד לִפְנֵי הָעֵדָה, לְשָׁרְתָם.» (במדבר טז, ט).ש

«C’est donc peu, pour vous, que le Dieu d’Israël vous ait distingués de la communauté d’Israël, en vous admettant auprès de lui pour faire le service du tabernacle divin, et en vous plaçant en présence de la communauté pour la servir?» (Nombres 16: 9)

Moïse tente de modérer les ardeurs de Kora’h et des deux-cent cinquante princes  de son parti.  Au terme «C’en est trop» prononcé par Kora’h et les princes rebelles, Moïse rappelle à Kora’h, son neveu, par ces simples mots: «C’est donc peu» l’extrême privilège d’appartenir à la Tribu de Levi séparée du reste d’Israël (Nb. 18: 23-24; Deut. 18: 1-2) et de surcroît, à la famille de Kehat chargée de porter les instruments du Tabernacle (Nb. 4: 4-15).

Moïse, dont l’Eternel a «soutiré» de force l’acceptation de la mission qu’il lui confie au Buisson Ardent, (Ex. 3), conduira pourtant son peuple de manière exemplaire. Il verra son autorité de dirigeant contestée par Kora’h et les siens qui ne manquent point de répartie, car ils reprennent, à leur tour, l’expression «C’est donc peu» de Moïse:

ש«הַמְעַט, כִּי הֶעֱלִיתָנוּ מֵאֶרֶץ זָבַת חָלָב וּדְבַשׁ לַהֲמִיתֵנוּ בַּמִּדְבָּר: כִּי-תִשְׂתָּרֵר עָלֵינוּ, גַּם-הִשְׂתָּרֵר» (במדבר טז, יג).ש

«Est-ce peu que tu nous aies fait sortir d’un pays ruisselant de lait et de miel, pour nous faire mourir dans ce désert, sans prétendre encore t’ériger en maître sur nous!» (Nombres 16: 13)

Moïse attaqué sur le plan personnel et, faisant face à l’Eternel, tente de rappeler son entière probité et intégrité morale:

ש«לֹא חֲמוֹר אֶחָד מֵהֶם נָשָׂאתִי וְלֹא הֲרֵעֹתִי אֶת-אַחַד מֵהֶם» (במדבר טז, טו).ש

«Je n’ai jamais pris à un seul d’entre eux son âne, je n’ai jamais fait de mal à un seul d’entre eux» (Nb. 16: 15).

Cette joute oratoire entre Moïse et Kora’h n’est point sans rappeler le passage sur les mauvais bergers d’Israël où l’Eternel, après voir vilipendé (Ez. 34: 1-4) et écarté (Ez. 34: 9-14) les mauvais bergers de la direction d’Israël, décide de défendre ses plus faibles brebis:

ש«הַמְעַט מִכֶּם, הַמִּרְעֶה הַטּוֹב תִּרְעוּ וְיֶתֶר מִרְעֵיכֶם תִּרְמְסוּ בְּרַגְלֵיכֶם; וּמִשְׁקַע-מַיִם תִּשְׁתּוּ וְאֵת הַנּוֹתָרִים בְּרַגְלֵיכֶם תִּרְפֹּשׂוּן» (יחזקאל לד, יח).ש

«Est-ce trop peu pour vous de vous repaître d’un excellent pâturage pour que vous fouliez au pied ce qui reste de votre fourrage? De boire d’une eau bien clarifiée pour qu’avec vos pieds vous troubliez ce que vous en laissez?» (Ez. 34, 18).

La grandeur de Moïse ne se mesure point seulement à sa faculté d’éprouver de l’empathie pour le peuple d’Israël (Ex. 2:11) et de le conduire dans le désert, malgré ses multiples rebellions, mais à sa faculté de se considérer lui-même comme la brebis de l’Eternel.

Moïse, très réticent à l’égard du pouvoir, en appelle au jugement de l’Eternel (Nb. 16: 16-17), comme dans le livre d’Ezéchiel, après avoir mis à l’écart les mauvais pasteurs (Ez. 34: 9-14). De la même manière, Moïse décide, par l’épreuve des branches d’amandier, de confirmer l’élection divine en faveur d’Aaron et de sa famille pour la kehouna (prêtrise) (Nb. 17: 23).

John Dalberg-Acton affirme que « le pouvoir tend à corrompre, le pouvoir absolu corrompt absolument. Les grands hommes sont presque toujours des hommes mauvais ». Or, Moïse, le Prophète des prophètes, démontre que, parfois, les grands hommes peuvent être à la fois de bons pasteurs et de fidèles brebis.

 

[1]Parashat Kora’H: Nombres 16-1- 18-32

Si l’étude du TaNaKh vous fait rêver, n’hésitez pas à me joindre:

[email protected]

Au plaisir de vous retrouver,

Shabbat shalom!

Avec toutes mes amitiés,

Haïm Ouizemann

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3 réponses

  1. Heureusement que bien des grands hommes peuvent être à la fois bon berger et fidèle brebis… ce sont sans aucun doute les “plus grands”!!
    et… encore un bel article, Merci.

  2. Si toutes les âmes sur terre pouvaient être comme Moché, une fidèle brebis et un bon berger, sans doute Israël et les autres nations ne devraient plus subir le terrorisme et leurs actes atroces de même que les guerres en tous genres( Je ne peux avaler ce crime odieux commis sur cette pauvre jeune-fille de 13 ans. Paix à son âme).
    A quand le retour en Eden ????? Moché le bon berger et la fidèle brebis inspirez l’Humain. il en a tant besoin.
    Bernadette.

  3. Je comprends mal qu’on ait l’ambition d’être une brebis et de considérer comme normal d’avoir ou d’être un berger pour nos semblable. Ces textes ont étés écrits dans une société pastorale et avant que des démocraties ne s’installent.
    Certains SS très jeunes et embrigadés adolescents se sont conduits comme de fidèles brebis de Hitler parce qu’ils étaient dans une société où Hitler s’érigeait en pasteur de leur peuple et qu’ils n’avaient pas de recul par rapport à cette société dans laquelle ils vivaient. Et les gens qui ont aidés des personnes juives à se cacher sous le régime de Vichy ne se sont pas conduits comme des brebis mais comme des êtres libres autonomes et courageux.

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J’ai plus de 30 ans d’expérience dans l’étude et l’enseignement de la Bible. Il n’y a pas de limite à ce que la Bible prodigue comme connaissance et inspiration pour la vie.
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